La vision de Juifs et de Palestiniens s’affrontant dans les rues de Montréal démontre l’échec du multiculturalisme canadien. Pourtant, sur la question de la laïcité de l’État, c’est de ces communautés que proviennent les principaux opposants. Dans le conflit actuellement en cours dans les territoires occupés de Palestine par Israël, les principaux belligérants sont le mouvement islamiste du Hamas et l’État sioniste d’Israël. Deux leaderships reposant sur le fondamentalisme religieux.
Depuis la fondation d’Israël, suite à une résolution de l’ONU en 1948, le conflit entre les Palestiniens évincés de leur terre ancestrale et les colons sionistes juifs est cyclique. La culpabilisation de la communauté internationale par l’Holocauste des nazis n’est pas étrangère à la tolérance envers Israël. Peu de gens ont vu un documentaire sur la Nakba, mais rares sont ceux qui n’en ont jamais vu sur l’Holocauste.
La manipulation de l’information est profonde. Les fondements bibliques de la société occidentale et moyen-orientale incitent tant l’État d’Israël que les mouvements islamistes à ignorer le droit international et les résolutions de l’ONU qui leur déplaisent. Tout comme pour la laïcité de l’État, des groupes de croyants s’opposent aux lois votées par des institutions démocratiques.
La démocratie moderne provient de l’époque des Lumières dont les phares sont la Révolution américaine et la Révolution française. Les deux révolutions ont rejeté la monarchie de droit divin, mais aux États-Unis la religion fut préservée. D’où l’idée de la Destinée manifeste du pays lui permettant d’imposer son modèle de démocratie aux autres nations moins éclairées ! Dans ce modèle où les cultes religieux servent à justifier les injustices sociales, comme la spoliation des territoires autochtones au nom d’une terre promise, le potentiel de croissance est excellent : spécialement dans un pays vierge à l’aube de l’ère industrielle. Le succès des États-Unis éblouit la France à l’origine de l’époque des Lumières. En lui offrant la Statue de la Liberté, la France s’efface devant les États-Unis comme modèle de démocratie moderne.
Jean-Jacques Rousseau fut l’un des grands philosophes des Lumières, à qui l’on doit le concept du Bon Sauvage, maître de son destin. Ce concept provient des Canadiens d’origine : un professeur de Rousseau fut le Père Charlevoix, premier historien de Nouvelle-France qui avait parcouru le pays avec les coureurs des bois. Cet esprit de liberté d’Amérique fut transmis aux coureurs des bois par les fougueuses femmes autochtones. Toutefois, l’histoire écrite par les missionnaires chrétiens ne rend pas justice à ces squaws légendaires qui opérèrent le lien entre les deux mondes.
La colonisation anglaise de l’Amérique fut d’abord une affaire religieuse : des protestants puritains se sont installés définitivement sur la côte atlantique pour la gloire de leur religion. Par contre, la colonisation française avait des buts différents : elle était tournée vers le commerce des fourrures et la conversion des autochtones à l’Église catholique. Un commerce motivé par la Grande Alliance avec 4 nations autochtones en 1604. Cette alliance permet la fondation de Québec à 500 km à l’intérieur du continent. Le commerce de la fourrure ne retiendra au pays que le tiers des engagés français. Quant à la religion, il a été plus facile d’ensauvager un Français que de convertir un autochtone ; réfractaires à l’autorité d’un roi de droit divin, les colons ensauvagés prirent le nom de Canadiens. En 1701, la Paix de Montréal consolide l’alliance avec 39 autres nations autochtones.
L’Europe monarchique s’opposa à une République française laïque. La défaite de Napoléon à Waterloo a conduit à l’effondrement de cette France. En Amérique, suite à la déportation des Acadiens, à la Conquête, à la guerre biologique contre la révolte de Pontiac, à la répression des Patriotes, les Québécois se réfugient dans l’Église catholique. Jusqu’à la Révolution tranquille, le Québec devient le pensionnat francophone de l’Église catholique cultivant le communautarisme Pur Laine à l’anglaise. L’Église s’efforce d’effacer l’esprit autochtone qui caractérise les francophones d’Amérique. Toutefois, le Québec avec plus de 70 % de la production mondiale de l’industrie de l’érable démontre la profondeur de ses racines autochtones : une industrie maintenue grâce à l’esprit coopératif des Québécois suite à l’arrivée du sucre blanc des Antilles autour des années 1930.
Comparé au modèle sucre blanc, le modèle sucre d’érable a bien meilleur goût : moins d’écart social conduisant à la violence. Une nation québécoise laïque menace le socle religieux servant une élite s’enrichissant au détriment de l’environnement naturel et humain au nom d’une divine fiction. Le Canada actuel est un œuvre d’appropriation culturelle pour effacer de la mémoire mondiale l’origine de la démocratie moderne. Une démocratie inspirée des traditions autochtones de bienveillance. Une démocratie sans religion servant de passe-droit, tant pour la laïcité de l’État que pour les résolutions des Nations Unies. Les extrémistes religieux se font entendre au nom du combat contre le Mal à la faveur de la manipulation d’un vieux socle religieux monarchique : tant pour la laïcité de l’État que pour la question palestinienne. La religion demeure l’opium des peuples dans un monde où les multinationales remplacent les Empires. Pour contrer les Empires, le Printemps des Peuples en 1848 marque la création des nations en Europe : les revendications nationalistes des Patriotes de 1838 furent en avance de 10 ans !